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Portrait article de Maureen Demidoff

Publié le vendredi 15 avril 2011.


Magali Lutfalla : la peinture comme encrage dans sa vie d’expatriée

13/04/2011 par Maureen Demidoff.

 Française, expatriée en Russie, Magali Lutfalla est artiste peintre. Un art qui la protège des turbulences d’une vie itinérante. Depuis deux ans, elle expose ses toiles très contemporaines aux regards curieux des Russes.

Magali Lutfalla est inquiète lorsqu’elle parle d’elle. Elle n’aime pas se mettre en avant et préfère raconter les couleurs de ses peintures, le mélange des matières et les impressions qui s’en dégagent.

Arrivée en Russie en 2009, Magali Lutfalla a déjà deux expositions à son actif dans des Alliances Françaises. La première a eu lieu à Irkoutsk et la seconde est actuellement en cours à Ekaterinbourg, dans le cadre du festival d’art visuel. 42 toiles y sont exposées dont une quinzaine réalisée en Russie.

Deux autres expositions sont prévues, toujours en région, dans une galerie qui représente des musées publics. Une aubaine pour la peintre, qui cette fois rentre « dans les murs russes ».

« La peinture va de pair avec l’expatriation »

« J’ai rencontré Elisabeth Braoun, coordinatrice des Alliances Françaises en Russie, qui a été l’impulsion principale de cette aventure », explique Magali Lutfalla.

La peinture a toujours compté pour la jeune femme, mais c’est lors d’une expatriation en Argentine, il y a 5 ans, que sa passion a réellement pris forme. De façon quasiment compulsive, elle achète des toiles en quantité importante, de la peinture et du matériel.

« C’était un besoin presque vital de créer et de faire quelque chose de concret. J’ai commencé à peindre, et au bout d’un an, j’avais réalisé 60 tableaux. Il y en avait partout, jusque dans la chambre des enfants. C’était assez violent. Cela ressemblait à un besoin essentiel, sans doute par rapport à notre vie d’expatriés. Parce que j’avais une vie itinérante, j’ai voulu créer et faire quelque chose de concret », insiste Magali Lutfalla.

Totalement autodidacte, rechignant à faire de la technique, l’artiste souligne qu’elle recherche avant tout à se « retrouver dans la peinture » et que celle-ci lui permet de canaliser ses émotions. « On peut vite se perdre quand on est nomade », confie Magali Lutfalla.

La touche russe

Vivre en Russie n’a pas particulièrement influencé Magali Lutfalla qui reste fidèle à son univers. Pas de bulbes, pas d’églises russes. Pas de babouchkas. Parfois, il y a des échappées, comme avec ses peintures sur les femmes russes.

« C’est vrai, au début, la femme russe m’a inspirée. Je la trouve incroyablement féminine, volontaire, belle et exigeante. Un jour, un des visiteurs m’a dit en désignant une de mes toiles : « Elle, c’est ma femme ! Forte et belle. Je la reconnais, c’est celle que j’imagine ».

Pourtant, il est difficile de reconnaître un personnage dans la peinture de Magali Lutfalla. Les silhouettes sont fondues dans différents tons de couleurs, sous des couches de peintures superposées, travaillées à la spatule, avec des tissus, des éponges, mais jamais avec des pinceaux.

Lors des vernissages, elle rencontre des Russes qui s’interrogent devant la modernité de sa peinture. « A Irkoutsk, j’ai rencontré des femmes qui donnaient des cours d’art et qui trouvaient intéressant de voir qu’il pouvait y avoir toute cette liberté dans la peinture. C’était comme un soulagement pour elles. Elles appréciaient de ne pas voir de violence, souvent présente chez les artistes contemporains russes, et s’étonnaient également que mes peintures ne transmettent pas de message. »

Ne parlant pas encore suffisamment russe, Magali Lutfalla est souvent frustrée de ne pas pouvoir communiquer davantage avec ceux qui viennent la voir. Mais elle devine les expressions sur les visages et comprend la sympathie à travers les sourires.